Point de vue ABGI : l’informatique quantique

Le 4 février 2021

Le 21 janvier 2021, à Paris Saclay, Emmanuel Macron annonce un plan investissement massif dans le cadre de la recherche sur l’informatique quantique. Ce domaine de recherche est actuellement peu connu. Pourtant, les attentes en terme de résultats (performances, applications industrielles, …) sont nombreuses. La team Technologies de l’Information et de la Communication d’ABGI vous propose un état des lieux et un point de vue sur cette technologie d’avenir.

Ordinateur classique et ordinateur quantique : quelles différences ?

 

Un ordinateur normal (celui que vous utilisez actuellement) manipule l’information sous forme binaire (des 0 et des 1). Aussi, ce mode de fonctionnement a un avantage : il est facile à représenter du point de vue électrique. En effet, des « portes », fondées sur des transistors, réalisent entre elles, les fonctions élémentaires de la logique classique. Avec un réseau de portes, il est possible de réaliser toutes les transformations de l’état logique des bits et, finalement, n’importe quel calcul.

La base du concept de l’ordinateur quantique est d’utiliser des phénomènes quantiques pour multiplier la puissance de calcul des machines classiques. Ainsi, un ordinateur quantique utilise des bits quantiques, appelés « q-bits. Ces q-bits obéissent à un principe fondamental de la mécanique quantique qui est le principe de la superposition. Ce principe nous dit qu’un objet quantique peut se trouver dans une superposition de plusieurs états. Ainsi, un q-bit n’est pas seulement dans l’état 0 ou dans l’état 1. En effet, il peut être dans une superposition des deux. De facto, ces états permettent de démultiplier la capacité et la puissance de traitement des calculs. C’est pour cela que l’informatique quantique est importante :

  • permettre une amélioration des puissances de calculs,
  • ou encore de traitements des données, … 

L’informatique quantique en quelques dates

 

  • Richard Feynman (1980) est le premier à pressentir les possibilités faramineuses d’un ordinateur capable de tirer parti des lois quantiques.
  • D-Wave (D-Wave Systems), fondée en 1999, se présente comme la première entreprise d’informatique quantique au monde, fondée en 1999.
    En 2007, annonce de la construction d’un prototype de processeur de 28 qubits permettant de faire du recuit simulé quantique.
    Mai 2011, sortie du système D-Wave One annoncé comme le premier calculateur quantique commercial.

Les avantages de l’informatique quantique

 

L’ordinateur quantique apporte un certain nombre d’avantages :

  • tout d’abord, une puissance de calcul élevée,
  • puis une rapidité de calcul,
  • ainsi que l’amélioration des simulations,
  • et enfin, la quantité de données traitées.

Ces nouvelles capacités informatiques permettront de développer des solutions de modélisation et d’optimisation complexes.  Cette technologie pourra résoudre les problèmes les plus compliqués de manière beaucoup plus rapide. En effet, le quantique va offrir un niveau de puissance de calcul sans précédent. 

Une des limites scientifique : la décohérence

 

L’avantage de l’ordinateur quantique est d’autant plus grand que le volume d’informations à traiter est important. En effet, d’après la théorie, un ordinateur quantique a accès à la totalité des résultats possibles d’un calcul en une seule étape. Or, un ordinateur classique doit traiter l’information de façon séquentielle, un résultat après l’autre. Cependant, une des principales limitations de l’ordinateur quantique est la capacité des qubits à conserver leurs propriétés le temps du calcul. 

Un ordinateur quantique utilise le système quantique et peut simultanément exister dans deux états (état de superposition). Cependant, un des deux états disparaît dès que le système entre en contact avec le monde extérieur. La cohérence disparaît alors en raison du processus de “décohérence”. Et finalement, l’information du qubit est perdue. Or, du fait des interactions avec l’environnement (champ magnétique, lumière, agitation thermique…), un système quantique finit inexorablement par perdre ses propriétés. Ainsi, un qubit conserve actuellement ses propriétés quantiques durant 20 à 100 µs.

Pour faire de l’ordinateur quantique une réalité, le temps d’exécution des programmes quantique doit nécessairement être amélioré. Mais le bruit et le phénomène de décohérence limitent ce temps. 


Différents axes de recherche sont abordés afin de :

  • réduire le bruit (système cryogénique, supraconducteur à température ambiante, …),
  • corriger les erreurs de calcul liées à la décohérence (redondance de qubits pour créer un “qbit logique”),
  • développer un algorithme « quantique » capable d’exécuter davantage d’étapes de traitement dans le délai imparti. Et ce, avant que la décohérence n’impacte le résultat (technologie NISQ).

Des applications multiples 

 

Les applications possibles des ordinateurs quantiques sont nombreuses et variées. Cependant, établir tous les scénarii possibles et déterminer la solution la plus optimale sont les deux principales idées. 

 

Les domaines dans lesquels les innovations sont envisagées 

  • Machine learning et intelligence artificielle : la vitesse d’apprentissage est considérablement accélérée.
  • Cryptage des données : de nombreuses mesures sont nécessaires pour décrypter un message chiffré en q-bits, altérant l’état du système quantique. Le destinataire et l’émetteur sauront si le message est intercepté.
  • Secteur de la défense : amélioration de la sécurité des communications et de la précision des mesures et capteurs (exemple détection de sous-marins sous l’eau).
  • Télécommunications : les infrastructures quantiques et l’internet quantique sont actuellement à l’étude.
  • Énergie : recherche de la meilleure répartition en fonction de la demande et des ressources.
  • Réchauffement climatique et météorologie : développement de nouveaux systèmes qui permettent l’amélioration de prévisions météorologiques et du traitement de la réduction de l’empreinte carbone.
  • Le secteur de la santé : développement de nouvelles simulations moléculaires pour créer des médicaments et de nouvelles prescriptions.
  • La recherche en physique quantique pour approfondir les connaissances dans la physique des particules.
  • Le secteur de la finance pour améliorer des prévisions, et réduire le risque d’erreur.

 

Les organisations qui permettent de développer l’informatique quantique

La rupture technologique que présente un ordinateur quantique incite de grandes entreprises (comme IBM) à investir d’importants moyens. Elles s’associent ainsi à des communautés scientifiques ou créent leurs propres laboratoires de recherche.

  • La cryptographie post-quantique pour faire face aux dangers de l’ordinateur quantique : en 2005, La NSA (National Security Agency) recommande à l’administration américaine de passer à la cryptographie post-quantique, c’est-à-dire qu’elle résisterait à un attaquant disposant d’un ordinateur quantique.
  • Appel à projet international du NIST : en 2017, le NIST (National Institute of Standards and Technology) lance un appel à standardisation sur la cryptographie post-quantique pour une durée de 4 ou 5 ans. Le NIST  reçoit 69 candidats valides, parmi lesquels 12 sont proposées par des chercheurs d’une équipe-projet Inria (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique).

Une application concrète : l’exemple de la société Quandela

Quandela est un des fleurons de l’industrie française créée en 2017. Cette start-up construit des émetteurs de photons uniques. Ces particules élémentaires de la lumière permettent de transporter des bits d’information quantique (des qubits) sur de grandes distances. Les futurs réseaux de communications reposeront sur ce principe. Cette technologie, fruit d’une vingtaine d’année de R&D, est unique au monde car elle permet d’atteindre des taux d’émission de photons inégalés.

Grâce à ces émetteurs de photons, Quandela se lance aujourd’hui dans le développement d’un ordinateur quantique photonique, dont la mise en service est prévue à l’horizon 2023. Ainsi, il sera capable de réaliser des calculs complexes, difficilement atteignables par nos ordinateurs actuels.

Une telle technologie s’applique dans les domaines : 

  • de la cryptographie,
  • de l’optimisation des réseaux,
  • et plus généralement, des futurs calculateurs quantiques.

Quandela travaille également à développer des outils pour les communications quantiques, en partenariat avec Orange et Thales, acteurs industriels clé des communications et de la cybersécurité.

Aussi, depuis sa création, l’entreprise a réuni 5M€ de fonds privés et publics pour développer les outils incontournables de cette révolution technologique. Plusieurs centres de recherche à la pointe dans le monde entier (Australie, Autriche, Italie, Pays-Bas, Russie) ont signé de nombreux contrats. Quandela rassemble aujourd’hui une équipe d’une quinzaine d’experts internationaux.

Conclusion

Ainsi, la technologie quantique est en plein essor. Ces projets réalisés entre les secteurs publics et privés sont de réelles opportunités de renforcer la coopération entre les chercheurs issus de domaines différents. De plus, ces technologies étant à leurs prémices, les financements directs (Aides et subventions) ou indirects (Crédit d’Impôt Recherche) sont multiples pour les grandes entreprises ou les start-up (possibilité d’obtention du statut Jeune Entreprise Innovante).

Nos experts (Yosr Ben Youssef, Fabrice Caland, Luis Bento, Rémi De Almeida et Damien Baptiste) sont à votre disposition. Ainsi, ils aborderont avec vous les différents leviers de financement à activer pour vos projets de Recherche et Développement.

 

La Team Technologies de l’Information et de la Communication
ABGI France


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Bibliographie

 

 

Ordinateur classique et ordinateur quantique : quelles différences ?

 

Un ordinateur normal (celui qui vous utilisez actuellement) manipule l’information sous forme binaire (des 0 et des 1). Ce mode de fonctionnement a un avantage : il est facile à représenter du point de vue électrique. En effet, des « portes », fondées sur des transistors, réalisent entre eux les fonctions élémentaires de la logique classique. Avec un réseau de portes, il est possible de réaliser toutes les transformations de l’état logique des bits et, finalement, n’importe quel calcul.

La base du concept de l’ordinateur quantique est d’utiliser des phénomènes quantiques pour multiplier la puissance de calcul des machines classiques. Un ordinateur quantique utilise donc des bits quantiques, appelés « q-bits). Ces q-bits obéissent à un principe fondamental de la mécanique quantique qui est le principe de la superposition. Ce principe nous dit qu’un objet quantique peut se trouver dans une superposition de plusieurs états. Ainsi, un q-bit n’est pas seulement soit dans l’état 0, soit dans l’état 1, mais il peut être dans une superposition des deux. De facto, ces états permettent de démultiplier la capacité et la puissance de traitement des calculs. C’est pour cela que l’informatique quantique est importante : permettre une amélioration des puissances de calculs, de traitements des données, …

L’informatique quantique en quelques dates, c’est :

  • Richard Feynman (1980) est le premier à pressentir les possibilités faramineuses d’un ordinateur capable de tirer parti des lois quantiques.
  • D-Wave (D-Wave Systems), fondée en 1999, se présente comme la première entreprise d’informatique quantique au monde, fondée en 1999.

En 2007, annonce de la construction d’un prototype de processeur de 28 qubits permettant de faire du recuit simulé quantique.

Mai 2011, sortie du système D-Wave One annoncé comme le premier calculateur quantique commercial.

Les avantages de l’informatique quantique

L’ordinateur quantique apporte un certain nombre d’avantages :

  • la puissance de calcul élevée,
  • la rapidité de calcul, l’amélioration des simulations,
  • et aussi la quantité de données traitées.

Ces nouvelles capacités informatiques permettront de développer des solutions de modélisation et d’optimisation complexes.

Cette technologie pourra résoudre les problèmes les plus compliqués de manière beaucoup plus rapide. En effet, le quantique va offrir un niveau de puissance de calcul sans précédent.

Une des limites scientifique : la décohérence

L’avantage de l’ordinateur quantique est d’autant plus grand que le volume d’informations à traiter est important. En effet, d’après la théorie, un ordinateur quantique a accès à la totalité des résultats possibles d’un calcul en une seule étape. Or, un ordinateur classique doit traiter l’information de façon séquentielle, un résultat après l’autre. Cependant, une des principales limitations de l’ordinateur quantique est la capacité des qubits à conserver leurs propriétés le temps du calcul.

Un ordinateur quantique se sert du fait qu’un système quantique peut simultanément exister dans deux états (état de superposition). Cependant, un des deux états disparaît dès que le système entre en contact avec le monde extérieur. La cohérence disparaît alors en raison du processus de “décohérence” et l’information du qubit est perdue. Or, du fait des interactions avec l’environnement (champ magnétique, lumière, agitation thermique…), un système quantique fini inexorablement par perdre ses propriétés. Ainsi, un qubit conserve actuellement ses propriétés quantiques durant 20 à 100 µs.

Pour faire de l’ordinateur quantique une réalité, le temps d’exécution des programmes quantique doit nécessairement être amélioré. Mais le bruit et le phénomène de décohérence limitent ce temps. 


Différents axes de recherche sont abordés afin de :

  • réduire le bruit (système cryogénique, supraconducteur à température ambiante, …),
  • corriger les erreurs de calcul liées à la décohérence (redondance de qubits pour créer un « qbit logique »),
  • développer un algorithme « quantique » capable d’exécuter davantage d’étapes de traitement dans le délai imparti avant que la décohérence n’impacte le résultat (technologie NISQ).

Des applications multiples

Les applications possibles des ordinateurs quantiques sont nombreuses et variées. Cependant, établir tous les scénarios possibles et déterminer la solution la plus optimale sont les deux principales idées.

Les domaines dans lesquels les innovations sont envisagées 

  • Machine learning et intelligence artificielle : la vitesse d’apprentissage est considérablement accélérée
  • Cryptage des données : de nombreuses mesures sont nécessaires pour décrypter un message chiffré en q-bits, altérant l’état du système quantique. Le destinataire et l’émetteur sauront si le message est intercepté
  • Secteur de la défense : amélioration de la sécurité des communications et de la précision des mesures et capteurs (exemple détection de sous-marins sous l’eau)
  • Télécommunications : les infrastructures quantiques et l’internet quantique sont actuellement à l’étude.
  • Énergie : recherche de la meilleure répartition en fonction de la demande et des ressources
  • Réchauffement climatique et météorologie : développement de nouveaux systèmes qui permettent l’amélioration de prévisions météorologiques et du traitement de la réduction de l’empreinte carbone
  • Le secteur de la santé : développement de nouvelles simulations moléculaires pour créer des médicaments et de nouvelles prescriptions.
  • La recherche en physique quantique pour approfondir les connaissances dans la physique des particules
  • Le secteur de la finance pour améliorer des prévisions, et réduire le risque d’erreur

La rupture technologique que présente un ordinateur quantique incite de grandes entreprises (IBM) à investir d’importants moyens. Elles s’associent à des communautés scientifiques ou créent leurs propres laboratoires de recherche.

  • La cryptographie post-quantique pour faire face aux dangers de l’ordinateur quantique : en 2005, La NSA (National Security Agency) recommande à l’administration américaine de passer à la cryptographie post-quantique, c’est-à-dire qu’elle résisterait à un attaquant disposant d’un ordinateur quantique.
  • Appel à projet international du NIST : en 2017, le NIST (National Institute of Standards and Technology) lance un appel à standardisation sur la cryptographie post-quantique pour une durée de 4 ou 5 ans. Le NIST  reçoit 69 candidats valides, parmi lesquels 12 sont proposées par des chercheurs d’une équipe-projet Inria (Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique).

Une application concrète : l’exemple de la société Quandela

Quandela est un des fleurons de l’industrie française créée en 2017. Cette start-up construit des émetteurs de photons uniques. Ces particules élémentaires de la lumière permettent de transporter des bits d’information quantique (des qubits) sur de grandes distances. Les futurs réseaux de communications reposeront sur ce principe. Cette technologie, fruit d’une vingtaine d’année de R&D, est unique au monde car elle permet d’atteindre des taux d’émission de photons inégalés.

Grâce à ces émetteurs de photons ,Quandela se lance aujourd’hui dans le développement d’un ordinateur quantique photonique, dont la mise en service est prévue à l’horizon 2023. Ainsi, il sera capable de réaliser des calculs complexes, difficilement atteignables par nos ordinateurs actuels. Une telle technologie s’applique dans les domaines de la cryptographie, l’optimisation des réseaux, et plus généralement les futurs calculateurs quantiques. Quandela travaille également à développer des outils pour les communications quantiques, en partenariat avec Orange et Thales, acteurs industriels clé des communications et de la cybersécurité.

Depuis sa création, l’entreprise a réuni 5M€ de fonds privés et publics pour développer les outils incontournables de cette révolution technologique. Plusieurs centres de recherche à la pointe dans le monde entier (Australie, Autriche, Italie, Pays-Bas, Russie) ont signé de nombreux contrats. Quandela rassemble aujourd’hui une équipe d’une quinzaine d’experts internationaux.

Conclusion

La technologie quantique est donc en plein essor. Ces projets réalisés entre les secteurs publics et privés sont de réelles opportunités de renforcer la coopération entre les chercheurs issus de domaines différents. De plus, ces technologies étant à leurs prémices, les financements directs (aides et subventions) ou indirects (Crédit d’Impôt Recherche) sont multiples pour grandes entreprises et start-up (obtention du statut JEI, Jeune Entreprise Innovante). Nos experts (Yosr Ben Youssef, Fabrice Caland, Luis Bento, Rémi De Almeida et Damien Baptiste) sont à votre disposition pour répondre aux différents leviers de financement à activer pour vos projets de Recherche et Développement.