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Regard fiscal
La loi de finances pour 2020 est publiée depuis le 28 décembre 2019 au Journal officiel. Celle-ci comporte de nombreuses modifications relatives aux entreprises. Dans le cadre des débats parlementaires, le gouvernement avait annoncé une volonté de « sanctuariser » le Crédit d’impôt recherche. Cependant, nous constatons que le ministère des finances a apporté de nombreux amendements. Ils concernent à la fois le Crédit d’impôt recherche (CIR), le Crédit d’impôt innovation (CII) et le Crédit Impôt Frais de Collection (CIC). Ces modifications et évaluations n’encouragent pas à l’optimisme quant à la stabilité et la pérennité des dispositifs dans leurs configurations actuelles.
La part des dépenses de fonctionnement forfaitaires, du CIR et du CII, assises sur les dépenses de personnel est abaissé à 43 % au lieu de 50 %. Et ce pour les dépenses exposées à compter du 1er janvier 2020 (CGI, art. 244 quater B, II, c modifié).
Cette baisse des frais de fonctionnement ne concerne pas le taux des dotations aux amortissements, ni celui applicable aux jeunes docteurs.
Cet abaissement devrait permettre de réaliser 230 millions d’euros d’économies, soit environ 3,5 % du coût du dispositif du CIR.
Confiées à des organismes sous-traitants, elles connaissent des aménagements de leurs modalités. En effet, ces aménagements sont instaurés dans le but de lutter contre les abus d’une sous-traitance dite en cascade.
Cette mesure vise à empêcher toute possibilité de double valorisation. Et éviter que les mêmes travaux de R&D soient comptabilisés dans l’assiette du CIR de deux entités distinctes (du donneur d’ordre et d’un prestataire).
Dès lors, un donneur d’ordre ne pourra retenir dans l’assiette de son CIR, les opérations de recherche confiée à des organismes privés agréés ou publics, qui seraient ensuite de nouveau confiées par ces derniers à des organismes privés non agréés.
Les entreprises devront porter une attention particulière à la rédaction des contrats de sous-traitance. En effet, il devra être indiqué en des termes clairs les possibilités de sous-traitance. En cas de sous-traitance de second niveau le prestataire devra disposer de l’agrément, s’il n’est pas un organisme public.
Nous ne pouvons qu’attendre un document officiel (doctrine fiscale) qui vienne expliciter les modalités de mise en œuvre de ces dispositions.
Il est à noter également que les dispositions relatives à la sous-traitance dans le cadre du crédit d’impôt innovation ou du crédit d’impôt collection ne sont pas concernées par ces amendements.
La loi de finances pour 2019 avait pour objectif d’introduire une obligation déclarative complémentaire détaillée pour les entreprises exposant plus de 2 M€ de dépenses de recherche. Lesdites entreprises devaient remplir une déclaration annexe n°2069-A-1-SD. Celle-ci comprenant des informations relatives aux travaux de recherche en cours. C’est à dire,
En avril 2019, l’administration avait interrompu cette obligation.
Cette mesure a donc été supprimée pour les entreprises qui engagent moins de 100 M€ de dépenses. Concomitamment, l’application de l’amende de 1 500 € en cas de défaut de production de l’état annexe exigé est maintenue pour les entreprises engageant plus de 100 M€ de dépenses de recherche.
Une nouvelle obligation documentaire pour le recrutement de docteurs a été créé. Elle s’appliquera aux entreprises dont les dépenses de recherches sont comprises entre 10 et 100 millions d’euros. Cette déclaration devra être jointe à la déclaration du CIR. Et elle devra préciser pour l’exercice au titre duquel porte la déclaration CIR :
Le non-respect de cette obligation devrait être sanctionné par l’application de l’amende de droit commun de 150 € (AN, rapp. n° 2301 (2019-2020), Tome III, p. 182).
Le texte ne précise pas la date d’entrée en vigueur de cette disposition, à défaut elle s’applique à compter du 1er janvier 2020 (Loi de finances 2020, art. 1er, I, 3°).
A des fins d’évaluation des dispositifs incitatifs fiscaux, le CII et le CIC sont bornés jusqu’au 31 décembre 2022. Cette limitation dans le temps est justifiée comme accompagnant jusqu’au 31/12/2022 du règlement général des exemptions communautaires et des règles de minimis. Cette évaluation sera menée à compter de l’automne 2020.
Nous enregistrons également la prorogation du statut de Jeune entreprise innovante jusqu’au 31/12/2022.
Le statut de Jeune entreprise innovante, défini à l’article 44-sexies-0-A du CGI, a été prolongé par la loi de finances pour 2020 jusqu’au 31/12/2022. L’efficacité de ce dispositif est reconnue et permet un développement essentiel du tissu innovant des entreprises françaises.
Par ailleurs, l’une des conditions pour obtenir le statut de JEI est que la réalisation de dépenses de recherche doit représenter au moins 15 % des charges fiscalement déductibles de l’entreprise au titre de l’exercice. Une modification a été apportée à cette condition, en assouplissant ce critère des 15 % en neutralisant les charges afférentes aux actifs, qui subissent des variations de cours ou de marché. Ce qui entraînait une augmentation du niveau des charges financières susceptibles d’aboutir à la perte des exonérations fiscales et sociales.
Abordons les 3 évaluations distinctement
De nombreux rapports vont être remis au gouvernement par le parlement portant sur les sujets relatifs au CIR. D’ici le 30 septembre 2020, les rapports porteront entre-autres sur :
D’ici le 30 septembre 2021, les rapports porteront sur :
D’ici le 30 juin 2022 (article 46 LF 2020) un rapport devra être remis sur le dispositif de soutien aux Jeunes entreprises innovantes (JEI) portant sur :
Ainsi, l’ensemble des postes de dépenses constituant les différents dispositifs de soutien à l’innovation devraient peu ou prou être évalués.
À travers ces nombreuses mesures modifiées et ces différents rapports, nous constatons que le CIR, ainsi que les autres dispositifs incitatifs fiscaux de R&I, sont indiscutablement ciblés par le gouvernement. Le coup de rabot touchant le CIR en 2020 est un écueil important pour le soutien global de l’Innovation de nos entreprises.
Les pays plus réticents au CIR, comme l’Allemagne et la Suisse, s’engagent aujourd’hui dans la mise en place de leur propre dispositif. Par conséquent, il est à craindre que cela ne pèse sur la compétitivité et l’attractivité de la France et sur ses capacités d’Innovation à long terme.
Par Laïla EL OUALI,
Fiscaliste chez ABGI France
Relire : Quel avenir en 2020 pour le CII ?
Lien vers le texte officiel Loi de finances 2020