La méthanisation, aussi connue sous le nom de biométhanisation ou digestion anaérobie, désigne la réaction chimique de dégradation de matières organiques par des micro-organismes . ABGI vous présente les enjeux de cette filière d’avenir.Contrairement au compostage, la réaction de la méthanisation est dite anaérobie. En effet, elle a lieu en l’absence d’oxygène. Lors du processus, la matière première est transformée pour donner :
D’un côté, le digestat. Un produit riche en matière organique et minéraux, qui représente 70 à 90 % de la masse introduite en début de réaction. Cette matière résiduelle constitue un amendement intéressant dans les exploitations agricoles, assimilable au fumier et au lisier.
Et de l’autre, le biogaz. Un mélange gazeux composé :
D’environ 50 à 70 % de méthane (CH4),
Puis, de 20 à 50 % de gaz carbonique (CO2),
Et enfin, de quelques traces de NH3, N2 et H2 .
Ce biogaz peut être utilisé en substitution totale au gaz naturel, que ce soit pour la production de chaleur, la production d’électricité ou bien comme carburant.
Avantages et limitations technologiques
Par la multiplicité de ses usages et avec un réseau et des infrastructures largement développés sur le territoire, la méthanisation présente de nombreux avantages :
Tout d’abord, la diminution des émissions de gaz à effet de serre par remplacement de l’utilisation d’énergies fossiles. Une étude récente de l’analyse du cycle de vie du biométhane estime que les émissions de CO2 sont divisées par 10 pour chaque MWh, en comparaison au gaz naturel .
Puis, dans le secteur des transports, le biogaz permettrait d’éviter près de 80% des émissions de gaz à effet de serre par rapport au diesel.
Aussi, la méthanisation constitue une réponse intéressante à la problématique de valorisation de déchets, avec une diminution de la quantité de déchets organiques à traiter par d’autres filières.
Puis, la production de biométhane permet de contribuer à la stabilité économique d’exploitations agricoles. Ceci, en répondant à la fois à la problématique de gestion des co-produits, mais aussi en apportant un complément de revenus par la vente d’électricité issu de sa combustion.
Et enfin, ce procédé permet également un traitement des déchets organiques graisseux ou très humides, non compostables en l’état.
La méthanisation, une thématique de recherche actuelle
Bien que la construction du premier digesteur ait eu lieu en 1897 en Inde près de Bombay, de nombreux travaux de recherche et développement sont encore nécessaires pour que la filière méthanisation devienne compétitive. Les limitations et verrous technologiques identifiés regroupent notamment :
L’approvisionnement des unités, avec le besoin de s’assurer de la disponibilité de la matière première entrante sur le long terme.
Le manque de visibilité entre les producteurs et les consommateurs de ressources organiques au sein d’un territoire.
Le manque d’outils de planification de la production des recettes d’alimentation, pour atteindre un objectif de production énergétique sur une unité de méthanisation.
L’absence de protocoles standardisés pour estimer les performances méthanogènes d’un gisement. La conséquence directe étant un surdimensionnement global des digesteurs.
Le manque d’outils de suivi et d’optimisation des paramètres de fonctionnement, d’anticipation des dysfonctionnements, menant généralement à une utilisation sous-optimale des unités.
Une sous valorisation agronomique des digestats et notamment l’absence d’outils d’anticipation de la qualité agronomique des digestats en fonction de l’origine de la matière première.
L’acceptabilité locale des projets.
La méthanisation, une filière d’avenir
Chiffres clés
En 2020, la méthanisation s’inscrit comme une pièce supplémentaire du puzzle que constitue le mix énergétique français avec :
214 installations injectant du biométhane dans le réseau.
3,9 TWh de capacité de production.
73 % d’augmentation de la capacité de production par rapport à fin 2019.
450 000 tonnes de CO2 émises en moins (par rapport à l’utilisation de gaz naturel).
L’engagement de l’État
En France, le développement de la filière méthanisation est porté par des actions politiques fortes. Ces dernières sont menées dans le cadre de la lutte contre le changement climatique et de la recherche d’énergies alternatives aux énergies fossiles :
Tout d’abord, le plan Énergie Méthanisation Autonomie Azote (EMAA). Lancé en 2013 , il visait notamment à développer un modèle français de la méthanisation agricole. Aussi, son objectif était de 1000 méthaniseurs à l’horizon 2020.
La loi de Transition Énergétique pour la Croissance Verte (LTECV). Depuis 2015, elle fixe à 10 % la consommation de gaz renouvelable à l’horizon 2030.
L’arrêté du 24 avril 2016. Il fixe comme objectif pour 2023 une puissance électrique installée de 237 à 300 MW. Il exige également une injection de biométhane dans le réseau de 8 TWh.
Le Groupe de travail national Méthanisation. Son action est en place depuis 2018. Elle est à l’initiative du Secrétaire d’État auprès du Ministère de la Transition écologique et solidaire.
Enfin, la création du fonds d’investissement Eiffel Gaz Verts. Lancé en 2020, 200M€ sont débloqués pour soutenir le développement de la filière gaz renouvelable en France.
Quels financements pour soutenir la filière ?
La filière méthanisation en France s’est fortement développée ces dernières années grâce aux aides publiques dédiées : Fonds Chaleur, revalorisation du tarif d’achat de l’électricité, etc.. Selon le Commissariat Général au Développement Durable, ce développement devrait persister dans les prochaines années, au regard des nombreux projets en cours et au fort potentiel de cette technologie.
Par conséquent, pour soutenir ce développement et les différents acteurs du secteur, de nombreuses solutions de financement existent. Ainsi, l’ADEME a publié fin 2020 un guide pour le financement de la méthanisation. Il recense, aussi précisément que possible, les acteurs qui peuvent intervenir dans les plans de financement des installations de méthanisation .
Egalement, pour une entreprise française souhaitant développer ses activités dans la filière, celle-ci peut prétendre à des aides telles que le CIR/CII pour financer ses efforts de recherche.
Ces dispositifs (directs ou indirects) constituent de véritables solutions de financement pour cette filière. En effet, en plein essor elle se heurte encore à nombreux verrous techniques à explorer.
AngéliqueJALLAIS Consultante – Financement de l’Innovation
« État des lieux de la filière biogaz » ; E-cube, 1–109, 2015.
« Review on methanation – From fundamentals to current projects », Stefan Rönsch, Jens Schneider, Steffi Matthischke, Michael Schlüter, Manuel Götz, Jonathan Lefebvre, Praseeth Prabhakaran, Siegfried Bajohr, Fuel, vol. 166, 2016.
« Évaluation des impacts GES de l’injection du biométhane dans les réseaux de gaz naturel » Quantis et ENEA Consulting, 2017.
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