Octobre rose : point sur la recherche et l’innovation dans la lutte contre le cancer du sein
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Par Achouak CHALKHA, Consultante en financement de l’innovation
Le développement des batteries lithium-ion est un moteur essentiel de la transition énergétique mondiale. Ces batteries alimentent non seulement les véhicules électriques, mais aussi les systèmes de stockage d’énergies renouvelables. Ils alimentent également une large gamme d’appareils électroniques.
Cette révolution technologique est cependant confrontée à des défis environnementaux majeurs. Ces défis sont notamment liés à l’extraction des matières premières comme le lithium, le cobalt et le nickel, ainsi qu’à leur recyclage en fin de vie.
Les prévisions indiquent que la demande en lithium devrait connaître une hausse exponentielle d’ici 2030, poussée par l’explosion du marché des véhicules électriques. Ce secteur pourrait atteindre une valeur de 160 milliards de dollars, Figure 1. Cette croissance souligne la nécessité urgente de recherche et d’innovations, non seulement pour améliorer les performances des batteries, mais aussi pour en optimiser leur gestion en fin de vie.
Les batteries lithium-ion sont prisées pour leur haute densité énergétique. Cependant, la dépendance à l’égard de métaux critiques soulève des questions écologiques et éthiques. L’extraction de ces métaux rares a un impact environnemental significatif, notamment en termes de destruction des écosystèmes et de pollution des eaux.
Parallèlement, le taux de recyclage des batteries lithium-ion reste extrêmement faible, avoisinant seulement 5 % à l’échelle mondiale. Cette statistique souligne l’urgence de développer des infrastructures et des technologies capables d’améliorer le recyclage des batteries afin de réduire l’extraction de nouvelles ressources et d’atténuer la production de déchets.
En Europe, des réglementations ambitieuses ont été mises en place pour encourager le recyclage des batteries et promouvoir l’utilisation de matériaux recyclés. L’Union Européenne a récemment adopté des lois imposant l’intégration de métaux recyclés dans la fabrication de nouvelles batteries. Cette approche a pour objectif de réduire la dépendance aux ressources naturelles tout en renforçant l’économie circulaire au sein du secteur des batteries.
L’innovation dans le secteur des batteries lithium-ion se concentre autour de trois axes : l’augmentation des performances, l’amélioration de la sécurité et le recyclage des matériaux critiques. Les acteurs du secteur travaillent activement pour prolonger la durée de vie des batteries, tout en cherchant à réduire la dépendance aux métaux rares et l’empreinte environnementale globale associée à leur production et à leur fin de vie.
Les batteries à semi-conducteurs, une innovation récente, promettent d’améliorer significativement la densité énergétique et la sécurité, Tableau 1. Elles ouvrent la voie à des véhicules électriques ayant une plus grande autonomie et une meilleure stabilité thermique. Par ailleurs, les chimies alternatives, telles que les batteries lithium-fer-phosphate (LFP), gagnent en popularité. Contrairement aux batteries lithium-ion traditionnelles, les LFP n’utilisent ni cobalt ni nickel, ce qui réduit la dépendance à ces matériaux. Ces batteries sont particulièrement adaptées aux véhicules électriques de masse en raison de leur durabilité et de leur moindre coût.
Cependant, ces avancées technologiques ne peuvent atteindre leur plein potentiel que si elles sont accompagnées de systèmes de recyclage performants. Les méthodes actuelles de recyclage, principalement la pyrométallurgie et l’hydrométallurgie, permettent de récupérer certains métaux comme le cobalt et le nickel. Toutefois, le lithium, un élément clé, reste difficile à recycler de manière efficace. Des approches émergentes, telles que le recyclage en boucle fermée et l’utilisation de solvants ioniques, cherchent à augmenter le taux de récupération du lithium tout en minimisant l’impact environnemental, Figure 2.
Afin de promouvoir l’innovation dans le secteur des batteries et de soutenir les initiatives de recyclage, plusieurs dispositifs de financement ont été mis en place au niveau national et européen.
Le Crédit d’Impôt Recherche (CIR) accompagne les entreprises dans la réalisation de projet de recherche fondamentale, appliquée ou expérimentale, depuis plus de 40 ans. La recherche française dans le domaine des batteries est mondialement reconnue et compte des acteurs majeurs, tant privés que publics.
Le Crédit d’Impôt C3iV est un mécanisme fiscal récent conçu pour encourager les entreprises à investir dans la R&D des technologies de batteries durables. En vigueur du 1er janvier 2024 jusqu’à la fin du mois de décembre 2025, ce crédit permet de financer des projets d’investissements liés aux batteries. Cela inclut non seulement le développement de nouvelles technologies de recyclage, mais aussi l’optimisation des composants et matériaux des batteries pour en faciliter le recyclage futur.
Au niveau régional, des aides comme celle du Grand Est, « Soutien à l’optimisation de la consommation et de la gestion des ressources », offrent un soutien financier aux projets visant à réduire la consommation de matières premières et à améliorer la gestion des déchets. Cette aide, pouvant atteindre jusqu’à 200 000 €, est spécifiquement destinée aux entreprises, collectivités et associations ayant des projets innovants dans les domaines de la prévention, du réemploi et du recyclage des batteries.
Dans le cadre de l’initiative Horizon Europe, l’Union Européenne finance des projets ambitieux qui visent à accélérer l’innovation dans le recyclage des batteries. Ces projets s’inscrivent dans la volonté de l’Europe de développer une économie circulaire. Ils visent à réduire la dépendance vis-à-vis des matières premières vierges, tout en stimulant l’innovation technologique pour des solutions de recyclage plus durables. Voici un aperçu détaillé des principaux projets financés dans ce cadre.
Le projet RESPECT vise à relever un défi fondamental dans le domaine du recyclage des batteries : la gestion des différentes chimies de batteries et des états variés dans lesquels elles se trouvent (batteries usées, endommagées, etc.). Contrairement à une approche uniforme, le projet se concentre sur la revalorisation des batteries lithium-ion de diverses compositions. Cela inclut celles contenant des cathodes à base de nickel-manganèse-cobalt (NMC) et des batteries lithium-fer-phosphate (LFP). Chaque chimie de batterie présente des caractéristiques uniques en termes de processus de recyclage et de récupération des matériaux, rendant le défi plus complexe.
Le projet HighSpin a pour ambition de développer des batteries lithium-ion (LIB) de prochaine génération spécifiquement destinées aux secteurs de l’automobile et de l’aéronautique. Ces secteurs sont particulièrement exigeants en matière de performances énergétiques, de densité, de sécurité et de durabilité. Les batteries utilisées dans ces applications doivent supporter des conditions extrêmes, tout en offrant des performances de premier ordre. HighSpin se concentre principalement sur l’amélioration des matériaux actifs des batteries, notamment les cathodes et les anodes. Ces éléments influencent directement la capacité de stockage énergétique et la durée de vie des batteries. Le projet explore également de nouvelles techniques d’optimisation des microstructures, qui permettent d’améliorer la conductivité et la stabilité des matériaux.
BATTERY 2030+ est un programme de recherche de dix ans visant à développer des batteries performantes, fiables et durables pour renforcer la compétitivité européenne. Ce programme complète les efforts de l’Alliance Européenne pour les Batteries, en accélérant la découverte de nouveaux matériaux et technologies via l’intelligence artificielle et des systèmes intelligents. Son objectif est de favoriser une transition vers une économie circulaire et neutre en carbone. Le manifeste BATTERY 2030+ a été élaboré par de nombreux chercheurs et acteurs industriels européens. ABGi* y contribue, notamment pour coordonner les efforts de la communauté scientifique et industrielle.
Le projet ReUse se concentre sur le recyclage des batteries lithium-fer-phosphate, une chimie de plus en plus populaire dans les véhicules électriques. Malgré leurs avantages, ces batteries sont plus difficiles à recycler en raison de leur faible valeur économique intrinsèque. Notamment par rapport aux batteries contenant des métaux précieux comme le cobalt. ABGi a contribué au montage de ce projet collaboratif réunissant 14 partenaires, dirigé par Fraunhofer Institute.
Par ailleurs, le projet REVITALISE, doté de 3,5 millions d’euros, est un programme ambitieux visant à augmenter les taux de recyclage des batteries lithium-ion et sodium-ion. Ces deux types de batteries représentent une grande partie des flux de déchets de batteries usagées en Europe. Alors que les batteries lithium-ion sont largement utilisées dans les véhicules électriques et l’électronique grand public, les batteries sodium-ion sont une alternative émergente. Elles sont principalement destinées pour des applications stationnaires et de stockage d’énergie à grande échelle. Elles reposent en effet sur des matières premières plus abondantes et moins coûteuses.
Le projet SPARTACUS, vise à développer des solutions de capteurs pour détecter les mécanismes de dégradation et de défaillance des batteries avant la perte de performance. Il s’appuie sur des capteurs mécaniques, acoustiques, de température et d’impédance, intégrés à un système de gestion avancé des batteries (BMS). Ce système optimisera le cycle de vie des batteries tout en permettant une charge rapide. L’objectif est de réduire de 20 % du temps de charge sans affecter la durée de vie. ABGi a contribué au montage de ce projet impliquant 7 partenaires, sous la direction de Fraunhofer Institute.
Les PIIEC ont pour but de renforcer l’autonomie technologique et industrielle de l’UE dans des secteurs stratégiques. Ils soutiennent des initiatives transnationales axées sur la R&D, l’innovation et la production. Par exemple, ABGi a accompagné ACC dans le projet d’usine de fabrication de batteries à Douvrin-Billy-Berclau, assurant le suivi des dépenses et la préparation des dossiers en collaboration avec BPI France.
Enfin, la BEI a soutenu la construction d’une gigafactory de batteries lithium-ion par AESC à Douai, avec un prêt de 450 millions d’euros. Cette usine, destinée à produire des batteries pour les véhicules électriques de Renault, augmentera la capacité de production européenne. Elle contribuera également à la transition écologique, tout en créant environ 1 200 emplois. La capacité de production initiale de 9 GWh pourrait atteindre 24 à 30 GWh d’ici 2030, renforçant ainsi la réindustrialisation de la région.
En promouvant des projets de recyclage innovants et en soutenant la recherche sur les batteries de nouvelle génération, l’Union Européenne se positionne comme un leader mondial dans le domaine de l’électrification durable. Ces initiatives contribuent également à renforcer l’autonomie stratégique de l’Europe, en diminuant sa dépendance à l’égard des importations de matières premières et de batteries en provenance de régions politiquement instables.
Un exemple concret d’innovation dans le recyclage des batteries lithium-ion est le développement de Forsee Power, qui se concentre sur la réutilisation des batteries usagées dans des applications stationnaires. Une fois que ces batteries, issues des véhicules électriques, atteignent une capacité résiduelle de 75 %, elles sont réutilisées pour le stockage d’énergie renouvelable ou dans des systèmes d’alimentation de secours.
Cette approche permet une triple action :
L’entreprise ACC est également un acteur clé dans la réduction de l’utilisation des métaux critiques. Elle développe des batteries à électrolyte solide, qui permettent une plus grande densité énergétique tout en limitant l’utilisation du cobalt et du nickel. Ces technologies, en plus d’améliorer les performances des batteries, réduisent leur impact environnemental.
Enfin, Saft se démarque avec son Programme Net Zero, visant à réduire de 4 % par an l’intensité des émissions de gaz à effet de serre. L’entreprise innove également par l’éco-conception de ses batteries et l’intégration de matériaux recyclés dans leur production, renforçant ainsi son engagement en faveur de la durabilité.
Les innovations développées par des entreprises comme Forsee Power, ACC et Saft s’inscrivent dans une stratégie plus large visant à renforcer l’autonomie technologique de l’Europe. Ces entreprises contribuent à la mise en place de gigafactories pour la production de batteries lithium-ion à grande échelle, tout en réduisant l’impact environnemental de cette production. Ce modèle de fabrication, basé sur l’industrie 4.0, favorise une réindustrialisation du continent européen et soutient la transition énergétique en s’appuyant sur des solutions durables et locales.
L’intégration de ces technologies innovantes dans les chaînes de production européennes est un élément clé pour répondre aux objectifs de l’Union Européenne en matière de développement durable.
Ces avancées technologiques permettent non seulement d’améliorer les performances des batteries, mais aussi de garantir que leur cycle de vie complet, de la production au recyclage, s’inscrit dans un modèle plus respectueux de l’environnement.
Ces projets contribuent également à la souveraineté technologique européenne, un facteur essentiel dans un secteur aussi stratégique que celui des batteries lithium-ion, avec un rôle de premier plan dans la transition vers une économie bas-carbone.
*ABSISKEY a fusionné avec ABGi, sous l’entité ABGi
Octobre rose : point sur la recherche et l’innovation dans la lutte contre le cancer du sein
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